L'importance de l'expertise médicale

Dans un premier temps, il convient de bien conserver tous les éléments justifiant votre dommage et votre dossier médical (certificat médical initial, radio, scanner, IRM, compte rendu opératoire).

Ensuite, l’expertise médicale permettra la constatation de vos dommages. Elle est réalisée par un ou plusieurs médecins experts. Elle consiste en un examen de la victime afin de fournir une description médicale et technique du dommage corporel.

L’expertise médicale est primordiale car elle constitue la preuve de votre dommage corporel. Le calcul de votre indemnisation se fera sur la base des conclusions rendues par les médecins experts dans le rapport d’expertise médicale.

Il ne faut pas vous contenter d’une expertise proposée par l’assurance et réalisée par le seul médecin de votre compagnie d’assurance.

Il est impératif, d’exiger :

  • Que l’expertise soit contradictoire (c’est à dire une expertise où vous pourrez demander de vous faire assister par un médecin conseil de votre choix indépendant des compagnies d’assurance).
  • Ou bien que l’expertise soit judiciaire (c’est à dire une expertise ordonnée par un juge qui désignera un expert indépendant et à laquelle participera également votre propre médecin conseil et le médecin de la compagnie d’assurance).

En effet, si vous ne demandez rien et que vous vous contentez d’une expertise médicale réalisée par le seul médecin de votre compagnie d’assurance, celui-ci tentera de limiter vos préjudices, pour minimiser votre indemnisation. Il faut impérativement que l’expertise soit effectuée par discussion entre plusieurs médecins : le médecin mandaté par l’assureur et votre propre médecin conseil spécialiste indépendant.

Votre avocat, préparera avec vous cette expertise médicale, il rédigera préalablement une liste exhaustive de vos doléances, afin de poser les termes du débat. Il viendra avec vous à l’expertise médicale et vous assistera personnellement pour faire valoir vos droits, mettre en avant tous vos dommages corporels et vos besoins et vous défendre pour que les conclusions du rapport médical, qui servira de base à votre indemnisation soient conformes à la réalité de votre état de santé.

La notion de consolidation

La date de consolidation est définie comme « le moment où les lésions se sont fixées et ont pris un caractère permanent, tel qu’un traitement n’est plus nécessaire, si ce n’est pour éviter une aggravation, et qu’il est possible d’apprécier l’existence éventuelle d’une Atteinte Permanente à l’Intégrité Physique et Psychique ».

Il s’agit donc de la stabilisation de l’état de la victime. Les préjudices n’évoluent plus et ont donc un caractère définitif. Ce n’est qu’à partir de cette date de consolidation que la victime va pouvoir solliciter l’indemnisation de son préjudice. En attendant la consolidation de ses dommages, la victime pourra toutefois, avec l’aide de son avocat, percevoir des provisions ou avances.

La consolidation constitue également le point de départ de la prescription de 10 ans des actions en réparation.

Quels sont les préjudices indemnisables?

Pour évaluer financièrement votre préjudice et obtenir une indemnisation intégrale, votre avocat va devoir procéder à une analyse fine « poste par poste » de chacun de vos préjudices subis.

Pour ce faire, il utilise notamment la nomenclature dite Dintilhac, qui est un outil performant pour analyser de manière détaillée les différents préjudices subis. Cette nomenclature donne une liste détaillée de l’ensemble des préjudices pouvant être indemnisés. La nomenclature Dintilhac prend en considération aussi bien les préjudices subis par la victime directe que ceux subis par les victimes par ricochet, c’est-à-dire les proches de la victime directe.

Sur la base du rapport médical rendu par les médecins à la suite de l’expertise, votre avocat évaluera et chiffrera, minutieusement, chacun de vos préjudices avec des méthodes de calcul techniques propres à chaque préjudice. Ce chiffrage précis et complet sera un support solide pour ensuite négocier de manière exigeante avec la compagnie d’assurance ou défendre vos intérêts dans le cadre d’une procédure judiciaire afin d’obtenir la meilleure indemnisation.

Si vous faites le choix de vous défendre seul, la compagnie d’assurance vous proposera une offre nettement inférieure à ce que vous pouvez prétendre. Ne vous laissez pas guider par votre assurance !

1. Les préjudices subis par la victime directe

La nomenclature Dinthilac distingue :

  • les préjudices patrimoniaux (préjudices économiques qui correspondent soit à des pertes subies par la victime, soit à des gains manqués par celle-ci)
  • les préjudices non-patrimoniaux (préjudices des troubles personnels ressentis par la victime dépourvus de toute incidence financière)

Tous ces préjudices sont dits temporaires, lorsqu’ils ont été subis avant la consolidation, et permanents lorsqu’ils sont subis après la consolidation.

Temporaires (avant consolidation)
Préjudices patrimoniaux

  1. Dépenses de santé actuelles
    Il s’agit de toutes les dépenses de santé imputables à l’accident (frais médicaux, paramédicaux, pharmaceutiques, et hospitaliers) restées à la charge de la victime et non remboursés par la sécurité sociale ou organismes complémentaires.
  2. Frais divers
    Il s’agit de tous les frais et toutes les dépenses engagées par la victime avant la consolidation (honoraires médecins conseil, ergothérapeute, frais de transports, de télévision pendant l’hospitalisation, frais de garde d’enfants…)
  3. Tierce personne avant consolidation
    Il s’agit d’obtenir la prise en charge des frais liés à l’assistance nécessaire de la victime par une aide humaine dans les actes de la vie quotidienne. Il est possible d’obtenir une indemnisation financière même si cette aide est apportée par des proches.
  4. Perte de gains professionnels actuels
    Il s’agit d’indemniser la victime de la perte totale ou partielle de ses revenus entre la date du fait dommageable et la date de consolidation (perte totale ou partielle de salaires, primes, indemnités, chiffre d’affaire).
Préjudices extra-patrimoniaux

  1. Déficit fonctionnel temporaire
    Il s’agit de l’invalidité subie par la victime dans sa sphère personnelle jusqu’à la consolidation. (Préjudice physiologique mais aussi “perte de qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante”, séparation de la victime de son environnement familial et amical, privation temporaire des activités sociales, ludiques, sportives, sexuelles,)
  2. Souffrances endurées
    Il s’agit de toutes les souffrances physiques et psychiques endurées par la victime jusqu’à la consolidation.
  3. Préjudice esthétique temporaire
    Il s’agit des atteintes et altérations de l’apparence physique subies par la victime avant la consolidation. (Physiques, faciales, vocales, olfactives…)

 

Permanents (après consolidation)
Préjudices patrimoniaux

  1. Dépenses de santé futures
    Il s’agit des frais médicalement prévisibles, que la victime devra exposer dans le futur (frais et honoraires de médecins, infirmière, frais d’actes médicaux, d’appareillage et de prothèse, frais de rééducation…)
  2. Frais de logement adapté
    Il s’agit des frais que la victime devra exposer pour adapter son logement à son handicap (frais d’adaptation et d’aménagement du logement, travaux).
  3. Frais de véhicule adapté
    Il s’agit des frais nécessaires liés à l’adaptation du véhicule ou de l’acquisition d’un véhicule adapté.
  4. Assistance d’une tierce personne
    Ce poste vise à indemniser le coût pour la victime de la présence nécessaire, de manière définitive, d’une tierce personne à ses côtés pour l’assister dans les actes de la vie quotidienne.
  5. Perte de gains professionnels futurs
    Il s’agit ici d’indemniser la victime de la perte ou de la diminution de ses revenus. (Perte totale ou partielle de salaires, primes, indemnités, chiffre d’affaire, frais fixes des travailleurs indépendants,)
  6. Incidence professionnelle
    Il s’agit des incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle. (Préjudice subi par la victime en raison de sa dévalorisation sur le marché du travail, de sa perte d’une chance professionnelle, ou de l’augmentation de la pénibilité de l’emploi, la perte totale ou partielle des droits à la retraite…)
  7. Préjudice scolaire
    Ce poste de préjudice a pour objet de réparer la perte d’année(s) d’étude que ce soit scolaire, la modification d’orientation, voire une renonciation à toute formation, l’allongement du temps d’étude, l’impossibilité totale d’être scolarisé…
Préjudices extra-patrimoniaux

  1. Déficit fonctionnel permanent
    Il s’agit ici de réparer les incidences du dommage qui touchent exclusivement à la sphère personnelle de la victime. Il convient d’indemniser, à ce titre, non seulement les atteintes aux fonctions physiologiques de la victime, mais aussi la douleur permanente qu’elle ressent, la perte de la qualité de vie et les troubles dans les conditions d’existence personnelles, familiales et sociales qu’elle rencontre au quotidien après sa consolidation.
  2. Préjudice d’agrément
    Il s’agit de réparer l’impossibilité pour la victime de pratiquer régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisirs exercée antérieurement.
  3. Préjudice esthétique permanent
    Il s’agit de réparer les altérations définitives de l’apparence physique de la victime (par exemple les cicatrices, modification de la posture, modification de la voix…)
  4. Préjudice sexuel
    Il s’agit de réparer tous les préjudices touchant à la sphère sexuelle.
  5. Préjudice d’établissement
    Ce poste de préjudice cherche à indemniser la perte d’espoir, de chance ou de toute possibilité de réaliser un projet de vie familiale “normale”.

 

2. Les préjudices subis par les victimes par ricochet

Les victimes dites par ricochet, sont les proches de la victime directe, qui vont pouvoir demander la réparation de leur préjudice propre en raison du dommage corporel initial dont est atteinte la victime directe. Ce préjudice par ricochet devra être personnel, direct, certain, et licite.

Toutefois, en application du principe de l’opposabilité des exceptions, la victime par ricochet pourra se voir opposer les exceptions opposables à la victime directe (notamment, les limitations ou exclusion d’indemnisation en raison de la faute de la victime directe, ou les dispositions contractuelles…).

La nomenclature Dintilhac distingue également pour les victimes par ricochet les préjudices patrimoniaux et les préjudices extra-patrimoniaux.

Préjudices en cas de survie de la victime directe
Préjudices patrimoniaux

  1. Pertes de revenus des proches
    Il s’agit d’indemniser le proche de la diminution ou de la perte de revenus qui résulte de l’abandon temporaire ou définitif par le proche de son activité professionnelle personnelle pour soigner ou s’occuper de la victime handicapée.
  2. Frais divers des proches
    Il s’agit des frais exposés par les proches de la victime directe pendant la maladie traumatique ou à raison de son handicap définitif. (frais de transport, frais d’hébergement, aide humaine, aménagement du véhicule du proche…)
Préjudices extra-patrimoniaux

  1. Préjudice d’affection
    Il s’agit du préjudice moral subi par certains proches en raison du handicap présenté par la victime survivante, notamment par la vue de la douleur de la déchéance et de la souffrance de la victime directe. (par exemple, douleur morale causée par l’état de santé, angoisse quant à l’évolution de son état, désarroi face au handicap…). L’indemnisation de ce préjudice sera le plus souvent reconnue au cercle affectif ayant un lien de parenté (père, mère, époux,…), mais pourra être étendue au proche non-parenté ayant un lien affectif réel avec la victime.
  2. Préjudices extrapatrimoniaux exceptionnels
    Il s’agit ici notamment de réparer le préjudice de changement dans les conditions de l’existence, dont sont victimes les proches de la victime directe pendant sa survie handicapée. C’est-à-dire les changements que le handicap cause dans la vie quotidienne des proches (trajets et visites fréquents au blessé, abandon des activités personnelles habituelles, préjudice sexuel..)
Préjudices en cas de décès de la victime directe
Préjudices patrimoniaux

  1. Frais d’obsèques
    Il s’agit des frais d’obsèques et de sépulture que vont devoir assumer les proches de la victime directe
  2. Pertes de revenus des proches
    Ce poste de préjudice comporte en cas de décès de la victime 2 préjudices distincts :
    – d’une part, il s’agit d’indemniser les proches de la victime de la diminution de revenus lorsqu’ils sont obligés d’assurer jusqu’au décès de celle-ci une présence constante et d’abandonner temporairement leur activité professionnelle..
    – et d’autre part, d’indemniser les proches de la disparition des ressources qu’apportait la victime directe à son conjoint et ses enfants à charge avant son décès.
  3. Frais divers des proches
    Il s’agit des frais divers les proches de la victime ont pu engager à l’occasion de son décès ; ce sont principalement des frais de transports, d’hébergement et de restauration.
Préjudices extra-patrimoniaux

  1. Préjudice d’accompagnement
    Il s’agit ici de réparer un préjudice moral, « d’accompagnement de fin de vie”, dont sont victimes les proches de la victime directe pendant la maladie traumatique de celle-ci jusqu’à son décès. Le préjudice d’accompagnement traduit les troubles dans les conditions d’existence d’un proche, qui partageait habituellement une communauté de vie effective avec la personne décédée à la suite du dommage.
  2. Préjudice d’affection
    Il s’agit de l’indemnisation du préjudice moral subi par la victime par ricochet du fait du décès de la victime directe.

3. L’action successorale des héritiers en cas de décès de la victime directe.

En cas de décès de la victime directe, les héritiers victimes par ricochet, parallèlement à leur action visant à obtenir l’indemnisation de leur préjudice propre, peuvent exercer une action afin d’obtenir l’indemnisation des préjudices subis par la victime directe non encore indemnisés au moment du décès. Il s’agit d’une action exercée par le successeur de la victime venant aux droits de celle-ci.

Ainsi, si la victime directe décède avant d’avoir obtenu réparation, ses droits et actions sont en principe transmis aux héritiers. Les héritiers recueillent dans leur patrimoine, les créances de réparation nées en la personne du défunt pour les préjudices soufferts entre le moment de l’accident et le moment de sa mort. La transmission du droit à indemnisation aux héritiers concerne aussi bien les préjudices patrimoniaux que les préjudices extra-patrimoniaux subis par la victime du jour de l’accident jusqu’à son décès.

Que faire en cas d'aggravation de vos préjudices?

L’aggravation consiste en la dégradation de la situation antérieure en raison d’éléments nouveaux.

La victime pourra demander la révision des évaluations de ses préjudices par une nouvelle action :

  • soit en cas d’aggravation de ses préjudices après l’indemnisation
  • soit en cas de modification de sa situation entrainant de nouveaux préjudices patrimoniaux et extra-patrimoniaux
  • soit dans l’hypothèse d’un préjudice préexistant mais non inclus dans la demande initiale et donc non indemnisé

Pour être recevable de sa nouvelle action en réparation, la victime devra apporter la preuve de la réalité de son nouveau dommage et de l’imputabilité au fait générateur (accident, agression, attentat…)